Ouverture du Colloque « Fondation pour la Résistance »

Jeudi 21 septembre

Hôtel de Lassay
Seul le prononcé fait foi

Monsieur le Président, cher Louis Mermaz,

Monsieur le ministre, cher Jean-Noël Jeanneney,

Messieurs les députés,

Monsieur le Président de la Fondation de la Résistance, cher Gilles-Pierre Lévy,

Mesdames, messieurs, chers lycéens,

C’est une grande joie, mais aussi une fierté pour moi d’ouvrir ce colloque consacré au Conseil national de la Résistance, dans l’année du 80e anniversaire de sa création.

Il y a quatre mois, pour les 80 ans de sa réunion constitutive rue du Four, les députés pouvaient voir tout près d’ici, en salle des Pas-Perdus, une exposition sur le CNR qui s’ouvrait par l’extraordinaire rapport du 4 juin 1943, signé « Rex ».

« Rex », autrement dit Jean Moulin, chargé par le général de Gaulle de la difficile mission d’unifier les mouvements de la Résistance intérieure… Voici ce qu’il écrivait, une dizaine de jours après l’événement, au Commissaire à l’Intérieur André Philip :

« Je passe sur les difficultés matérielles de l’organisation d’une réunion de 17 membres tous recherchés ou au moins surveillés par la police et la Gestapo. J’ai la satisfaction de pouvoir vous dire que, non seulement tous les membres étaient présents à la réunion, mais [que] celle-ci s’est déroulée dans une atmosphère d’union patriotique et de dignité que je me dois de souligner. »

Ce rapport, déclassifié en 2015, était donc exposé en mai dernier au Palais-Bourbon, avec un ensemble de documents relatif à tous ces futurs députés qui siégeaient au CNR : Emmanuel d’Astier de La Vigerie, Daniel Mayer, André Mutter, Robert Chambeiron, André Mercier, Eugène Claudius-Petit…

Aujourd’hui, c’est une exposition sur les 80 ans de l’Assemblée consultative provisoire que nous venons de déployer, dans le même souci de transmettre et de valoriser qui est celui de votre Fondation, monsieur le président. Et la présence ici de nombreux jeunes, venus des lycées Molière, Le Corbusier et Évariste-Galois, nous donne l’occasion de dire à la nouvelle génération ce que fut l’Occupation et ce que signifia la Résistance.

Du CNR à l’ACP, nous retrouvons ce souci d’organiser le débat et le pluralisme, de refonder l’État démocratique et social, malgré toutes les difficultés de l’heure.

Comment réunir des organes délibératifs quand le pays est occupé ? Comment préparer l’avenir sous les bombes et la menace constante d’une arrestation ? Petite-fille de résistant, je suis particulièrement sensible à la geste de ces hommes et de ces femmes qui, alors que tout semblait perdu, ont relevé la tête et décidé de combattre l’inacceptable.

On ne rendra jamais assez hommage à leur courage. Et ce courage n’était pas de l’inconscience : il se nourrissait de principes solides et de cet invincible optimisme qui leur permettait de discerner, dans la noirceur de leur temps, l’aube des jours heureux.

Ils furent combattants, héros de l’ombre, agents de renseignement, saboteurs, maquisards… Mais ils furent aussi bâtisseurs, dessinant l’architecture de notre modernité.

Certains connurent la prison, d’autres eurent la douleur de perdre des parents, des amis, des frères d’armes, assassinés ou déportés : ces épreuves ne firent que fortifier leur humanisme, les rendant pour toujours soucieux de la dignité de la personne humaine. 

Et puisque j’ai évoqué tout à l’heure la haute figure d’Eugène Claudius-Petit, je voudrais rappeler la constance de son engagement contre la peine de mort, qu’il combattit tout au long de ses huit mandats, de 1945 à 1978 : amendements, propositions de loi, questions écrites, déclarations, tous les moyens dont dispose un député, il les mit au service de ses convictions abolitionnistes.

Et puis – sans prétendre évoquer, devant les universitaires renommés qui sont ici réunis, tous les apports de la Résistance à la reconstruction de la France –, je terminerai en évoquant la place qu’elle reconnut aux femmes, enfin.

Certes, le CNR n’avait rien de paritaire. Mais ses membres savaient ce que la France libre et l’ensemble des mouvements de Résistance devaient à ces milliers de Françaises, et aussi d’étrangères, qui prenaient des risques pour renseigner, passer des messages, diffuser la presse clandestine, et parfois combattre les armes à la main cette horreur en actes que fut le nazisme.

À la Libération, les Françaises devinrent « électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes », conformément au vœu du général de Gaulle, approuvé par les délégués à la Consultative. Et l’un de mes premiers actes mémoriels, en tant que Présidente de l’Assemblée nationale, a été d’honorer d’une plaque dans l’hémicycle ma presque homonyme Madeleine Braun, résistante, députée communiste, et première femme à avoir présidé une séance, comme vice-présidente, en 1946.

Mesdames, messieurs, vous le voyez, la flamme de la Résistance française ne doit pas s’éteindre et, à l’Assemblée nationale, elle ne s’éteindra pas. 

Je suis très heureuse de vous voir si nombreux ici pour saluer la mémoire de ces engagés à qui nous devons tant. Dans cette maison où ont siégé pas moins de 66 Compagnons de la Libération, dont mes prédécesseurs les présidents Jacques Chaban-Delmas et Achille Peretti, vous êtes les bienvenus. 

Je vous remercie.
 

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