Ouverture de la 5e édition de l’Assemblée des idées : « L’intelligence artificielle : sommes-nous prêts ? »

Mardi 30 mai

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Seul le prononcé fait foi

Chers invités, citoyens engagés, honorables députés,

C’est avec une grande fierté et un immense plaisir que je vous accueille ce soir à l’Assemblée nationale pour notre soirée débat exceptionnelle, intitulée « L’Assemblée des idées ». Cet événement reflète la politique d’ouverture que j’ai instaurée au sein de notre institution, une politique qui vise à rassembler experts, citoyens et députés autour de sujets de société majeurs, directement liés à nos pouvoirs publics et à notre action.

Aujourd’hui, nous nous penchons sur une question qui ne cesse de susciter l’intérêt et l’interrogation : « L’intelligence artificielle : sommes-nous prêts ? » Cette interrogation résonne au cœur de notre société, car nous sommes à l’aube d’une révolution technologique qui transforme notre quotidien, notre économie et nos perspectives.

Chers amis, nous vivons une époque passionnante où la fusion entre l’humain et la machine offre des possibilités infinies, mais soulève également des questions éthiques, sociales et juridiques. La technologie évolue à une vitesse vertigineuse, et il est de notre devoir d’appréhender ses enjeux, d’anticiper ses impacts et de définir un cadre qui garantisse le respect de nos valeurs fondamentales.

Je tiens à vous assurer que l’Assemblée nationale est pleinement mobilisée sur ce sujet crucial. Dans cette optique, permettez-moi de vous annoncer la création de la mission d’information sur l’intelligence artificielle générative, lancée par la commission des Lois de notre Assemblée au mois de mai 2023. Cette mission a pour ambition d’analyser les enjeux et les défis de l’intelligence artificielle générative en matière de protection des données personnelles et d’utilisation du contenu produit.

Sous la direction des rapporteurs, Philippe Pradal et Stéphane Rambaud, la mission évaluera si notre cadre juridique actuel est suffisant pour faire face à ces avancées, tout en étudiant les propositions de réglementation émanant de la Commission européenne. 
Cette mission témoigne de notre volonté d’être à la pointe de la réflexion et de l’action sur ces enjeux d’avenir.

Mesdames, messieurs, le discours que vous venez d’entendre a été produit par ChatGPT. Je pourrais conclure sur le même ton et faire semblant d’avoir rédigé ce texte, mais je préfère vous avertir et, surtout, procéder avec vous à un petit retour sur cet exercice d’intelligence artificielle appliquée à la politique.

Bien programmé par mon cabinet, ChatGPT a élaboré un texte qui globalement convient et peut faire illusion : il faut saluer la prouesse technique, qui nous permet de mesurer toute l’efficacité de l’outil.

Pourtant, si on analyse de près ce discours très lisse et très correct, on y décèle quelques défauts caractéristiques de l’IA.

D’abord, peut-être avez-vous été surpris de m’entendre saluer au début les « honorables députés ». Bien sûr, les représentants du peuple sont par définition très honorables, mais cet adjectif appartient surtout à la tradition anglo-saxonne dans laquelle on salue habituellement les « honorables membres du Parlement ». C’est un détail, mais révélateur d’une réalité à laquelle nous devons songer : 

celui qui impose l’outil impose aussi son langage, ses concepts, ses références culturelles, et pour tout dire, ses normes sociales. De ce point de vue, ChatGPT n’est pas neutre.

Ensuite, le discours au fond très conformiste et prudent issu de l’IA est tout de même assez creux : il relève tout simplement de l’ancienne « langue de bois » si décriée en politique. Il repose sur des formules convenues, des images éculées, des stéréotypes : « l’aube d’une révolution », la « vitesse vertigineuse » des évolutions, les « enjeux » qu’on « appréhende »… 

On peut s’en contenter, car l’ensemble est rassurant et ronronnant, mais en ce qui me concerne, jamais je ne tolérerais de ma « plume » une telle succession de formules toutes faites et d’idées reçues ! Où sont la passion, la conviction, où est la force poétique d’un discours inspiré par l’engagement et la volonté de transformer la société ? L’IA sécrète un propos qui endort, alors que le vrai discours politique a pour but de réveiller les consciences.


Enfin, et c’est pour moi le point le plus inquiétant, le discours produit par la machine est purement assertif, affirmatif : dans sa novlangue il nous dit avec assurance que tout va bien dans le meilleur des mondes, que tout est sous contrôle et que nous pouvons dormir sur nos deux oreilles. Aucun doute, aucun questionnement : il y manque le recul, et avec lui l’idée que plusieurs voies sont possibles, que la critique est légitime, que la société est fondée à s’interroger sur « la fusion entre l’humain et la machine » qu’il énonce comme allant de soi. Et je pense avec effroi à cette pensée prophétique de Jean-Jacques Rousseau : « Plus il y aura de machines pour faire le travail des hommes, plus il y aura des hommes qui ne seront que des machines. »

Le doute et le questionnement, c’est donc à nous de les apporter ce soir. Tel est bien le but de « l’Assemblée des idées » qui en est à sa cinquième édition. Telle est aussi la fonction de l’Assemblée nationale, qui se nourrit des travaux des chercheurs et des experts pour légiférer de la manière la plus pertinente possible. 

Sur l’intelligence artificielle, avant la mission d’information en cours que j’ai déjà évoquée, un rapport d’information a été publié dès 2017 ; puis, sous la précédente législature, s’est constitué un groupe d’études sur l’économie numérique de la donnée, de la connaissance et de l’intelligence artificielle. Les députés ne sont donc pas à la traîne sur ces sujets, au contraire.

Plus largement, cette Assemblée que je veux ouverte sur le monde est très attentive aux sciences, fondamentales et appliquées. Nous allons bientôt célébrer les 40 ans de l’OPECST, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, un organe commun à l’Assemblée nationale et au Sénat dont je salue le travail.

Dans quelques jours, je lancerai ici même un événement visant à encourager les femmes à se projeter dans des carrières scientifiques. Et le 19 juin, pour le cinquantenaire du programme Ariane, ce sont des engins spatiaux, une maquette de fusée, un module lunaire qui se poseront au Palais-Bourbon.

Oui au progrès, oui à la science, mais jamais sans conscience : c’est dans cet esprit que j’ai voulu ouvrir le débat de ce soir et je suis heureuse d’accueillir des invités qui, eux non plus, ne se contentent pas de lieux communs :

Asma Mhalla, spécialiste des enjeux politiques et géopolitiques de la Tech, membre du Laboratoire d'Anthropologie Politique et enseignante à Columbia, SciencesPo et Polytechnique.

Isabelle Ryl, professeur des Universités, directrice de la Paris AI Research Institute.

Etienne Klein, Physicien et Directeur de recherche au CEA.

Ce débat sera animé par Clément Méric, journaliste à LCP, que je remercie d’avoir accepté cette mission délicate.

Car ce soir, nous innovons. C'est la 5e édition de l’Assemblée des idées et nous avons pu noter, lors des précédentes, une certaine frustration du public, liée au très grand nombre de questions. Pour y répondre, nous testons ce soir une application qui va permettre de les regrouper, de les recouper et de faire en sorte que chacun reçoive une réponse.

Le débat de fond est ce qu’il y a de plus exigeant, de plus difficile. C’est le contraire de la polémique stérile et de la facilité idéologique : écouter l’autre, échanger des arguments, accepter d’apprendre, tel est le pari profondément humaniste de « l’Assemblée des idées », et je vous remercie tous de vous être rendu disponibles pour y prendre part.

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