Samedi 12 juillet 2025
Discours
Discours
50e session plénière de l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie
Jeudi 10 juillet
Institut de France
Seul le prononcé fait foi
Monsieur le Président du Sénat,
Monsieur le Président de l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie,
Mesdames et Messieurs les Présidents de Parlement,
Madame la Déléguée générale de l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie,
Mesdames et messieurs les parlementaires,
Monsieur le Chancelier de l’Institut,
Monsieur le Secrétaire Perpétuel,
Monsieur le Vice-président de l’Académie des sciences morales et politiques,
Monsieur le Secrétaire perpétuel de la 2e division de l’Académie des sciences,
Mesdames, messieurs,
« Langue de la République en vertu de la Constitution, la langue française est un élément fondamental de la personnalité et du patrimoine de la France. (…) Elle est le lien privilégié des États constituant la communauté de la Francophonie. »
Si, en exergue de mon discours, j’ai choisi de citer l’article 1er de la loi du 4 août 1994, plus connue sous le nom de « loi Toubon », c’est parce qu'il cristallise la gémellité intellectuelle et la fraternité institutionnelle qui unissent l’Institut de France, l’Assemblée nationale, et l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie.
Je voudrais ainsi, devant vous, me livrer à un exercice plutarquien, en esquissant les vies et vocations parallèles de nos institutions.
Parallèles par l'architecture, tout d'abord.
À l'Assemblée nationale comme au Collège-des-Quatre-Nations – où nous vous remercions encore, monsieur le Chancelier, monsieur le Secrétaire Perpétuel, de nous accueillir – nous prenons place dans deux hémicycles, deux sanctuaires du verbe, conçus dans leur architecture même pour que la parole s’épanouisse et le débat fleurisse.
Parallèles, ensuite, par l’importance accordée au verbe et au mot juste.
Sous cette Coupole métonymique comme dans nos parlements respectifs, nous pouvons délibérer longtemps sur la précision d’une définition, la nuance d’un terme.
Parce qu'un simple « notamment » introduit par amendement, peut infléchir une politique publique. Et parce que ne l’oublions jamais, en 1875, la IIIe République fut introduite à une voix et un mot près, au détour d’un timide complément du nom, celui de l’amendement Wallon.
C’est pourquoi, dans un chiasme politico-littéraire, l’Académie française a compté des députés parmi ses Immortels, et l'Assemblée nationale des Immortels parmi ses députés.
Je pense à mes prédécesseurs, Édouard Herriot ou Edgar Faure. Ou bien à Alphonse de Lamartine, Victor Hugo, Raymond Poincaré, Valéry Giscard d’Estaing, ou Simone Veil – qui certes ne fut pas députée, mais dont la parole marqua, un 26 novembre 1974, l’histoire de l’hémicycle.
Nombre de ces orateurs illustres ne naquirent pas dans l’Hexagone, mais dans les vastes mondes de la Francophonie : à l’image d'Aimé Césaire ou de Léopold Sédar Senghor.
L’Institut de France, lui aussi, rayonne d’autant plus qu'il s'est ouvert à toutes les voix du monde, dans ses cinq Académies. Monsieur le Secrétaire perpétuel, cher Amin Maalouf, vous incarnez vous-même cette Francophonie qui plonge ses racines dans plusieurs terres pour mieux s’élever.
Aujourd'hui, sous la Coupole, je suis fière de voir que la Francophonie des lettres, des sciences et des arts siège et dialogue avec la Francophonie politique et parlementaire, incarnée par l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie et les Présidents d’Assemblée qui nous font l'honneur d'être parmi nous.
Notre présence commune est comme un signe et un symbole de nos vocations croisées : pour l’Institut de France, préserver le génie de notre patrimoine scientifique, artistique et linguistique ; pour le Parlement, promouvoir, par la loi, son rôle libérateur et émancipateur au sein de la cité.
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Permettez-moi ainsi de continuer à esquisser nos vies parallèles, en décrivant nos responsabilités partagées.
À vous, Immortels, votre mission fut assignée par les lettres patentes de Louis XIII : « donner des règles certaines à notre langue et la rendre pure, éloquente et capable de traiter les arts et les sciences ».
Mais cette langue française, avant qu'elle soit protégée, fixée, codifiée, il a fallu la diffuser et même l'imposer.
Ce combat linguistique et politique s’est joué sous la Coupole. Comme il fut mené à l'Assemblée nationale, notamment par un ancien député de Nancy et Président de l'Assemblée nationale : l’Abbé Grégoire.
Cette « défense et illustration » de la langue française, l'Assemblée nationale n’a cessé de l’assumer depuis.
Avec la loi Bas-Lauriol de 1975, rendant obligatoire le français dans la publicité et l’industrie de consommation.
Avec la révision constitutionnelle de 1992, qui a inscrit à l’article 2 de notre loi suprême cette évidence : « La langue de la République est le français. »
Avec la loi Toubon de 1994, qui 31 ans après son adoption, est plébiscitée par plus de 9 Français sur 10.
Avec la révision constitutionnelle de 2008, qui a fait entrer la Francophonie dans notre Constitution, au titre XIV.
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Enfin, notre dernière mission commune, ce n'est pas seulement de protéger notre langue dans le présent. C’est de l’ouvrir vers l’avenir.
Un ancien député, sénateur et académicien, Victor Hugo, nous avait déjà avertis : « les langues ni le soleil ne s’arrêtent plus. Le jour où elles se fixent, c’est qu’elles meurent. »
Ce soleil francophone, pour qu'il continue de rayonner, doit donc épouser son temps et évoluer avec lui.
Et la première de ces évolutions, c'est celle de la féminisation.
On caricature parfois l’Académie en la qualifiant de conservatrice. Pourtant, Hélène Carrère d’Encausse a été élue Secrétaire Perpétuel, 23 ans avant que l'Assemblée nationale n’élise sa première Présidente !
Et en fidèle « greffière de l’usage », selon l’expression consacrée, je note aussi que l’Académie a fait évoluer sa doctrine sur la féminisation des termes. Je ne peux ainsi m’empêcher de citer votre rapport de 2019 : « Si les Français décidaient de porter une femme à la présidence de la République [ou ajouterai-je, à la Présidence de l'Assemblée nationale,] on voit mal quelle raison pourrait s’opposer à l’emploi de la forme féminine « présidente », attestée dès le XVe siècle (...) »
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Ouverte sur la société et ses évolutions, notre langue doit être aussi toujours plus ouverte aux grands vents du monde.
En 2023, à Abidjan, dans la patrie d’Ahmadou Kourouma, où je participais à la réunion annuelle de la région Afrique de l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie, j’avais pu réaliser combien le nouchi – le parler urbain ivoirien – pouvait enrichir notre langue : par exemple en tressant des néologismes aussi imagés que "boucantier" (pour quelqu'un qui fait du boucan,), ou "faroter" (pour frimer).
Oui, la Francophonie recèle d’un immense potentiel – alors même qu'en 2050, le français pourrait être la 2e ou 3e langue la plus parlée au monde.
Et c'est cette ambition d’assumer la vocation diplomatique et politique de la Francophonie que nous portons, avec le Président Larcher, en cette 50e plénière de l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie.
À travers elle, c'est aussi un puissant message de fierté que nous voulons transmettre.
La fierté de parler le français, cette « langue de liberté et de fraternité », comme l’a décrite mon prédécesseur, et académicien, Edgar Faure.
Oui, soyons fiers que le français soit aujourd'hui la langue des peuples et des États qui se parlent, la langue du droit et du multilatéralisme, la langue du dialogue et de la nuance.
À l’heure où le monde se brutalise, où le multilatéralisme onusien s’épuise et s’effrite, où l’expression de « communauté internationale » confine à l’anachronisme, notre Francophonie peut représenter encore davantage qu'une communauté linguistique : une véritable alternative politique et diplomatique. Celle que nous incarnons avec l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie.
Mesdames, Messieurs,
C’est cet idéal de paix et de dialogue que portait aussi l’Immortelle académicienne Jacqueline de Romilly, qui fit briller les lettres grecques comme vous les latines, Monsieur le Chancelier (cher Xavier Darcos).
Je la cite pour conclure : « Apprendre à penser, à écouter l’autre, être capable de dialoguer, c’est le seul moyen d’endiguer la violence effrayante qui monte autour de nous. »
C’est en ce sens que notre langue est plus qu'un idiome : c'est un idéal, une idée, une communauté de sens, de conscience et de confiance.
Une communauté qui nous relie et nous rassemble en ce jour. Je vous remercie.
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