Rencontre des Entrepreneurs de France
Lundi 26 août
Hippodrome de Paris-Longchamp
Seul le prononcé fait foi
M. le Président du Sénat, cher Gérard LARCHER,
M. le Ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, cher Bruno LE MAIRE,
M. le Président du Mouvement des Entreprises de France,
M. Patrick MARTIN, que je remercie pour son invitation,
Chers entrepreneurs – et entrepreneuses, Chers tous ici présents,
Monsieur le président du MEDEF, vous avez commencé votre discours en citant Mick Jagger. Je suis particulièrement sensible à vos références musicales, puisque j’étais présente à ce fameux concert, non pas en 2022 mais en 1995, ce qui ne nous rajeunit pas ! Mais vous me permettrez, devant vous, je pense que le MEDEF appréciera, de faire avec Jean-Jacques Goldman le choix du made in France : « Je ne me souviens que d'un mur immense - Mais nous étions ensemble - Ensemble, nous l'avons franchi ».
Oui, je le crois, lorsque l’on est ensemble, lorsque l’on se rassemble, lorsque l’on additionne les forces, alors, il n’est pas de mur qui ne puisse être franchi. Jamais autant qu’aujourd’hui notre pays n’a eu besoin, à ce point, de cet état d’esprit qui ne s’invente pas, qui ne se décrète pas, qui ne s’impose pas : cet état d’esprit, il doit être voulu.
Bien sûr, la Nation doit et sait se rassembler lorsque les circonstances l’exigent. Ce qui s’est passé samedi devant la synagogue de La Grande-Motte est le révélateur d’un antisémitisme croissant qui m’inquiète, qui nous inquiète tous j’en suis sûre, et qui exige que nous nous rassemblions pour dire non : non à la haine, non à la violence, non à la stigmatisation, non au rejet.
Les responsables politiques que nous sommes ont une grande responsabilité face à toutes les formes que revêtent la violence et la haine.
Avec Gérard Larcher, nous avons pris nos responsabilités en novembre dernier, en organisant la grande marche pour la République et contre l’antisémitisme, à l’occasion de laquelle les Français ont répondu présents si nombreux ! Et nous serons là, ensemble, à chaque fois que cela sera nécessaire.
Ce rassemblement doit cependant s’inscrire dans la durée, et vous avez raison, bien sûr : le contexte politique particulier que nous connaissons appelle à l’union de tous ceux qui rejettent le pessimisme, le défaitisme.
« Tenez vous loin des gens négatifs, ils ont un problème pour chaque solution » disait Albert Einstein. J’en appelle au rassemblement des gens positifs, et sur la scène politique, nous savons où ils se trouvent. Notre pays a besoin d’eux, notre économie a besoin d’eux ! En cette période d’incertitude politique, où tant de murs doivent être franchis, il est donc à la fois symbolique et essentiel que les présidents des deux chambres de notre Parlement se présentent ensemble devant vous, les forces économiques de notre pays.
Ensemble, avec le président Larcher, au-delà de nos sensibilités différentes, nous sommes venus vous faire part d’une conviction commune… Plus que jamais en cette période, garantir la stabilité institutionnelle est absolument essentiel pour notre pays.
Cette stabilité institutionnelle n'est en effet pas un concept abstrait ; elle est un des fondements sur lequel repose la confiance nécessaire pour innover, former, recruter, investir dans la durée, prendre des risques et faire avancer le pays.
C’est donc l’engagement que je suis venue prendre devant vous aujourd'hui. Vous pouvez compter sur moi, vous pouvez compter sur nous, pour veiller, aux côtés du président de la République, à la stabilité institutionnelle du pays, comme pour veiller à la qualité de notre débat public parlementaire. En pensant toujours à l’intérêt supérieur du pays, à la France et aux Français.
Avant de réfléchir à ce qu’il convient d’entreprendre, demandons-nous d'abord ce qu'il convient d’éviter.
Et ce qu'il faut éviter, c'est d’abord une politique qui détruit, par dogmatisme ou électoralisme, les réformes qui ont produit des résultats.
S’il faut 10 ans pour construire la confiance, il suffit de quelques jours pour la défaire. Or la France ne peut pas se permettre aujourd'hui de jouer aux apprentis sorciers de l’économie.
Il faut être clair : ce sont les plus fragiles, ce sont nos services publics, ce sont nos petites et moyennes entreprises qui seraient d’abord les victimes du chaos économique.
Notre économie a besoin de visibilité pas d’idéologie, de stabilité pas de grand soir, et de rationalité, pas de populisme. Et vous l’avez dit, cher Patrick Martin : on ne peut pas faire comme si le monde n’existait pas.
Mais si nous devons repousser l’isolationnisme ou l’irréalisme économique, nous devons aussi refuser le défaitisme. Nous devons être des adeptes du « parler vrai ».
Et « parler vrai », c’est d’abord reconnaître les succès obtenus depuis 2017 – cher Bruno Le Maire. Les succès d’une politique de l’offre conduite avec constance depuis une décennie.
Une politique dont vous êtes très nombreux à reconnaître les avancées.
Les avancées pour l’emploi, avec la création de 2 millions d’emplois depuis 2017. Si aux dernières législatives le chômage n’était pas le sujet de préoccupation majeur de nos compatriotes, ce n’était pas le fruit du hasard.
Des résultats tangibles ont aussi été obtenus pour la réindustrialisation de notre pays, ou son attractivité : puisque pour la 5e année consécutive, la France a conservé son titre de championne d’Europe des investissements étrangers.
Mais il ne faut pas se voiler la face. « Parler vrai », c'est aussi reconnaître que des obstacles importants se dressent devant nous.
Il y a d’abord un obstacle imminent. L’obstacle budgétaire. Sur ce sujet, il faut parler en responsabilité : nous ne devons surtout pas abandonner l’objectif de rétablissement de nos finances publiques, pour revenir à 3% de déficit du PIB.
Il ne s’agit pas d’une simple cible comptable. C’est aussi la condition de notre capacité à agir, à emprunter et donc à investir notamment pour nos écoles, pour nos hôpitaux, pour la transition climatique, pour nos enfants.
Il faudra donc trouver des économies, avec pour seule règle celle de l’efficacité de la dépense au service du bien public. Mais il est tout aussi essentiel de ne pas reproduire les erreurs commises au tournant des années 2010.
C’est pourquoi la consolidation budgétaire ne devra obérer ni la croissance ni la compétitivité de toutes nos entreprises.
Et de même qu'il nous faut conjuguer efficacité et équité, il nous faut aussi conjuguer le court et le long terme et pour cela miser sur la productivité.
Cette productivité est l’éléphant dans la pièce - car il y aujourd'hui une crise de la productivité française : elle a reculé de 3,5 % entre 2019 et 2023.
La redresser est un objectif incontournable. Pour cela il est nécessaire de continuer à investir massivement pour l’innovation. Avec le plan France 2030, nous avons investi comme jamais – 56 milliards pour l’intelligence artificielle, l’espace, le nucléaire…
Et face au mur d’investissements auquel fait face l’Europe tout entière, pour sa défense ou la transition climatique, nous devrons activer de nouveaux leviers de financement.
Nous devons aussi continuer à miser sur la politique éducative, sur la formation pour favoriser l’accession à l’emploi, le retour à l’emploi ainsi que l’emploi des séniors.
C’est une question de productivité, oui, mais avant tout il s’agit de tenir la promesse de notre République, cette promesse républicaine contenue dans le préambule de la Constitution de 1946 : la Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement. Elle garantit l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation professionnelle et à la culture. « Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi ».
Et c'est précisément cet esprit qui a justifié la réforme du RSA en cours d’expérimentation. Les 15 heures obligatoires d’activité, d’accompagnement, de formation sont avant tout un moyen pour permettre à chacun de retrouver un emploi, de retrouver sa place dans la société, comme ancienne responsable aux Restos du Cœur, je l’ai vu : quand on accompagne une personne éloignée de l’emploi, quand on lui redonne confiance, on lui rend sa place pleine et entière dans la société.
Voilà pourquoi le budget devra être celui du courage, des choix difficiles, mais également être le budget de l’équité.
Car les Français, en votant massivement aux législatives, ont exprimé des attentes fortes.
Nous devons apporter des réponses à nos compatriotes aux fins de mois difficiles. Nous devons rassurer les Français qui ont peur de l’avenir pour leurs enfants, ceux qui vivent l’insécurité, l’absence de soins ou l’isolement, familial ou géographique. Nous devons entendre ces chefs d’entreprise et artisans qui se battent jour après jour, ceux qui ne bénéficient d’aucun dispositif, d’aucune aide malgré leur travail et leurs efforts.
Non seulement il nous faut entendre tous ces Français ; mais il faut encore répondre à leurs attentes en termes de justice sociale – et puisqu'il sera beaucoup question de « Pouvoir » lors de cette Rencontre, nous ne devrons donc pas oublier ce « pouvoir d’achat » qui demeure au sommet des préoccupations des Français.
Pour y répondre, il faut d’abord que le travail paie plus et mieux en France.
Est-il par exemple soutenable que pour augmenter de 100 € le revenu d'un employé au Smic, l'employeur doive débourser 2 à 3 fois plus ? Poser cette question, c'est y répondre ; et il faut donc réfléchir au coin fiscalo-social et en lisser les effets de seuil.
Mais il existe encore d’autres injustices ressenties par nos concitoyens. Ils jugent tout d’abord que les efforts ne sont pas partagés équitablement. C'est pour cela que la taxation des superprofits marque tant l’opinion publique.
Cependant, si je peux dire « oui » à la taxation raisonnée des superprofits, je dis « non » à la surtaxation tout court. La fiscalité doit encourager l’audace, pas punir la réussite.
Mais il existe encore une autre injustice qui me tient à cœur. Ce sont les inégalités femmes-hommes en entreprise.
Est-il encore acceptable en 2024 qu'à temps de travail égal, le salaire des femmes soit inférieur de 15,4 % à celui des hommes (et encore de 4 % à poste comparable) ?
Est-il encore acceptable en 2024 que malgré des progrès que je veux saluer, 3 entreprises seulement dans le CAC 40 soient dirigées par des femmes (Catherine MacGregor chez Engie, Christel Heydemann chez Orange et Estelle Brachlianoff chez Veolia).
Cette situation n'est pas seulement injuste ; elle est économiquement irrationnelle. Car toutes les études montrent que la parité est une source de performance pour l’entreprise.
Alors je vous le dis franchement : cet objectif de la parité, il est de notre responsabilité à tous de le concrétiser. C’est la responsabilité du législateur bien sûr – mais c'est aussi votre responsabilité et celle de vos mandants. Ce combat nous le mènerons et nous le gagnerons ensemble ! Mais j’en appelle également aux femmes. Allez-y, foncez, et « apprenez à oser », pour reprendre la devise d’une célèbre école de commerce (HEC) !
Mesdames et messieurs, la grande coalition dont notre pays a besoin ne doit pas se limiter aux seuls acteurs politiques. Nous avons besoin d’une coalition qui rassemble les Français, leurs élus, les acteurs économiques, patronaux, syndicaux, associatifs.
J’en appelle donc aux entreprises – à vous. Je sais que beaucoup le font déjà, mais il est temps d’intensifier nos efforts. Prenez toute votre place dans cette grande coalition du pays que j’appelle de mes vœux. Assumons ensemble nos responsabilités !
Mesdames et Messieurs, nous devons donc poursuivre les grandes transformations pour la France.
Et pour les engager, nous avons attendu un mois, mais nous ne pouvons pas attendre un an. L’horloge tourne. Vous l’avez dit, M. le Président du MEDEF : le monde ne nous attend pas.
Et pourtant, face à cette urgence, il y a ceux qui préparent déjà la prochaine dissolution et qui ferment les yeux sur l’urgence sociale. Ceux qui préfèrent l’inaction et leur intérêt partisan à l’intérêt général. Ils ignorent que ne pas bouger, c’est faire reculer le pays.
Et d’un autre côté, il y a ceux qui considèrent que l’inaction est un luxe que nous ne pouvons plus nous permettre. Ceux qui considèrent qu'il faut agir sans plus attendre et en responsabilité. Agir pour nos entreprises, agir pour vous, agir pour les Français.
Je vous propose donc d’ouvrir ensemble – et dès à présent– ce chemin d’action.
Ce chemin, c'est celui de l’unité et de la stabilité. C'est celui du bon sens et du compromis.
C’est celui du réalisme mais aussi de l’optimisme et de l’audace.
C’est celui de la France.
Mais admettons-le : ce chemin est escarpé, « la voie est étroite » comme on dit en montagne. Le fond n’est rien sans la méthode, nombreux sont ceux qui l’ont oublié et leurs projets sont depuis aux oubliettes. La méthode oriente le vent et nous n’avons pas besoin de vents contraires, pardonnez-moi cette métaphore marine mais là aussi, je suis dans mon élément !
Il me revient donc de vous parler du « comment ». C’est sans doute aussi pour cela que vous m’avez invitée. Nous avons des réponses, celles que nous avons trouvées à partir de 2022, mais mon propos sera plus large, le contexte le requiert.
Il a été question de concertation ? Oui, bien sûr, il nous faut davantage concerter, faire confiance aux partenaires sociaux.
Nous le savons, aujourd'hui, pour qu'une réforme soit acceptée, elle doit être concertée. Certains s’en plaignent, nostalgiques qu’ils sont d’une époque où l’on pouvait tout décider d’en haut. C’était peut-être jadis plus efficace, mais ça ne marche plus. On peut le regretter, mais c’est aussi la marque d’une démocratie plus mûre, où les citoyens ont pris la place des « sujets » du Roi d’antan : il faut désormais fédérer les forces autour d'un projet commun.
Vous me direz que cette culture du compromis existe déjà dans vos entreprises. C’est vrai, tant mieux, elle n’a même jamais été aussi dynamique : le nombre de nouveaux accords d’entreprise et de branche a atteint des niveaux sans précédent. L’emploi des séniors, la formation continue, la parité, l’insertion des personnes en situation de handicap, la transition climatique, vous n’avez que l’embarras du choix.
Oui, les réformes à venir devront être largement concertées avec les partenaires sociaux.
J’imagine que le Président Larcher nous en parlera, car je connais son attachement à la démocratie sociale, celle-ci lui doit beaucoup, au-delà de la loi qui porte son nom. Le MEDEF, cher Patrick Martin, a bien sûr une position incontournable dans ce dialogue.
Néanmoins, je ne suis pas là pour tenir des propos convenus : on ne dialogue réellement qu’avec ceux qui écoutent, qui proposent, qui s’entendent, qui sont prêts à « bouger », car dans le cas contraire, la concertation n’est qu’une figure de style, un passage obligé. Il appartient donc aux partenaires sociaux de donner du sens à cette méthode.
De surcroît, le dialogue social n’est pas une boite noire, ignorant ce qui se passe à l’extérieur, faisant fi des autres voix qui s’expriment, et qui sont légitimes à le faire, au premier rang desquelles se trouve la voix des citoyens. Depuis 2017, la démocratie participative se trouve sur le dessus de notre boite à outils.
Cet outil n’est pas dans un placard. Il est entre nos mains. Il y a eu la Convention sur le climat, le Grand débat, la Convention sur la fin de vie, et toutes ces consultations dont on parle peu mais que nous avons su organiser avec succès. Bien sûr, tout n’a pas marché, mais on apprend en essayant et que je sache, le principe s’est imposé : j’en appelle à plus de démocratie participative autant qu’au dialogue social, ces deux approches doivent non pas s’opposer mais se rencontrer, se conjuguer.
Ainsi, je vous le redis avec force : la grande coalition à construire pour le pays, ce n'est pas seulement une coalition politique. C'est une coalition économique, ce « front économique » que vous appelez de vos vœux, cher Patrick Martin, c’est aussi une coalition sociale, et plus largement, c’est une coalition démocratique. C’est une coalition avec vous, une coalition avec les Français.
Et l’Assemblée nationale dans tout cela ? ’
J'entends ici et là, des voix qui s’élèvent et qui nous disent que c’est ici que se trouve le problème. J’écoute, mais j’observe aussi : ça n’a pas si mal marché durant ces deux années au cours desquelles nous avons expérimenté ce qu’est une Assemblée sans majorité absolue. L’Assemblée nationale n’est pas le problème, elle est la solution ou, en tout cas, l’un des éléments de la solution.
Cette culture du compromis y existe aussi. Nous l’avons prouvé lors de la dernière législature. L’ingénierie institutionnelle n’a jamais été aussi créative : ensemble, avec tous les groupes politiques, nous avons travaillé, loin des caméras, nous avons inventé des règles pour organiser dans ce nouveau contexte les fameuses semaines de l’Assemblée et l’ordre du jour dit transpartisan, nous avons expérimenté de nouvelles pratiques, par exemple pour les Questions au Gouvernement adressées pour la première fois directement au Premier ministre, nous avons encadré les semaines de débat et les horaires de séances...
Toutes ces heures passées avec les dix présidents de groupe, à l’Hôtel de Lassay, on en parle peu, je voulais vous en parler.
Au-delà de la mécanique, il y a le fond. En deux ans, 40 textes ont été définitivement adoptés à l’unanimité, près de 90% étaient des propositions de loi, parfois portées dès l’origine par plusieurs groupes politiques dans le cadre des semaines transpartisanes que je viens d’évoquer.
Ce fut le cas de la loi interdisant la publicité pour la fast-fashion, pour protéger la souveraineté de notre industrie textile. Et ce que nous avons fait pour le textile dans un esprit transpartisan, nous devrons le faire pour d’autres secteurs économiques.
Car il faut le dire : rouvrir une usine, innover, gagner de nouveaux marchés, augmenter le chiffre d’affaires et les salaires, ce n'est pas être de droite ou de gauche, c’est servir l’intérêt général.
Ce travail de co-construction et de compromis, nous le menons avec le Sénat. Connaissez-vous le pourcentage de commissions mixtes paritaires qui ont été conclusives sous la XVIe législature, entérinant ainsi un accord entre les deux assemblées ? 85 %. Les faits, les chiffres, en disent souvent davantage que les discours.
Durant ces deux années, je le crois, nous avons fait l’apprentissage de ce qu’est une Assemblée sans majorité absolue. Et après tout, deux ans pour apprendre ce que l’on n’a jamais fait, ce n’est pas si long, et le résultat n’est pas déshonorant.
Il faut regarder ce qui s’est passé, car ma conviction profonde est que la précédente législature n’a pas été une parenthèse, pas plus que ne le sera celle qui a débuté au mois de juillet dernier : le temps des coalitions est venu, la majorité absolue c’est terminé, la France doit apprendre à fonctionner comme le font toutes les grandes démocraties, en réunissant des forces politiques qui ne sont pas d’accord sur tout, mais qui trouvent des accords.
Sans doute, pour cela, il nous manque encore des règles qui nous font défaut. Au premier rang desquelles : une réforme du mode de scrutin, la proportionnelle. Nous en avons déjà les effets, pourrions-nous en avoir les bienfaits ? J’avais relancé le débat sur ce sujet au début de l’année, je suis prête à remettre l’ouvrage sur le métier.
Par ailleurs, ce que l’on a commencé à faire, il faudra le faire davantage puisque le seuil de la majorité absolue s’est encore éloigné. Prenons un exemple : il est vital que la co- construction s’amplifie, et pas seulement dans les mots.
Dès l’ébauche d’une réforme, d’un avant-projet, les parlementaires doivent être associés, de façon sincère.
Un débat d’orientation pourrait avoir lieu, permettant aux parlementaires de co-construire les réformes avec le Gouvernement.
En somme, nous y revenons, il nous faut, à tous les niveaux, rassembler ceux qui, sincèrement, ont envie de se donner les moyens de vivre ensemble, pour leur famille, pour leurs amis, pour leur outil de travail, pour leur pays, dans l’Europe et dans ce monde qu’il nous faut regarder tel qu’il est, et tel qu’il pourrait être.
L’entente entre les partis, entre les Nations, l’Europe, le travail en commun, alors vous ne serez pas surpris si je termine mon propos avec Jean Monnet. « Je me suis toujours concentré sur une même chose, disait-il : faire travailler les hommes ensemble, leur montrer qu’au-delà de leurs divergences ou par- dessus les frontières, ils ont un intérêt commun. »
Ce que Jean Monnet a fait était impossible disait-on à l’époque ? Je crois que ce que nous devons faire est possible. A condition de le vouloir, et de bien s’y prendre. On dit parfois que : « Quand le vent souffle, il y a ceux qui construisent des moulins, et ceux qui construisent des murs ». Ensemble, construisons des moulins, franchissons les murs, aussi immenses soient-ils.
Je vous remercie.