Séance plénière de l’APFA (Assemblée parlementaire franco-allemande)

Lundi 4 décembre

Bonn
Seul le prononcé fait foi

Madame la Présidente du Bundestag, chère Bärbel,

Mesdames et messieurs les députés, chers collègues,

Madame la ministre plénipotentiaire, monsieur le ministre,

Monsieur l’ambassadeur,

Mesdames, messieurs,

Je suis toujours heureuse de retrouver les membres de l’Assemblée parlementaire franco-allemande, ces artisans actifs et convaincus de la relation franco-allemande dont je salue l’engagement.

Après Strasbourg, après la Sorbonne, c’est de nouveau en un lieu hautement symbolique que nous nous réunissons aujourd’hui : dans l’ancien hémicycle du Bundestag, à Bonn.

En cette ville fédérale, a été élaborée et adoptée la Loi fondamentale de 1949 instaurant un nouvel ordre constitutionnel et politique sur le territoire des onze Länder d’Allemagne de l’Ouest. En 1990, les cinq Länder de l’Est les ont rejoints. 

Près de 75 ans après son adoption « pour une période transitoire », selon les termes du Préambule de 1949, cette Constitution préside aujourd’hui encore aux destinées du peuple allemand : 75 ans est d’ailleurs un âge tout à fait honorable pour une Constitution. Nous venons de fêter les 65 ans de notre Ve République française.

65, ce fut aussi le nombre des membres du Conseil parlementaire, réunis ici même, dans les locaux de l’ancienne Académie de pédagogie, de septembre 1948 à mai 1949 : parmi eux, Konrad Adenauer, Theodor Heuss, Carlo Schmid. Leur œuvre force l’admiration et je tiens ici à leur rendre hommage. 

En arrimant la République fédérale au monde libre et démocratique, ils ont ouvert la voie à la paix et à la réconciliation en Europe. Ils ont su tirer les leçons de l’Histoire. Ils ont su jeter les bases de ce que l’ancien Chancelier fédéral Helmut Kohl a qualifié d’« État le plus libre, le plus humain et le plus social qui ait jamais existé sur le sol allemand ».

J’ajouterai modestement que la « République de Berlin » est restée fidèle aux principes fondamentaux de l’« esprit de Bonn » : ancrage à l’Ouest, solidarité atlantique, intégration européenne, amitié franco-allemande, primauté du droit sur la force, coopération multilatérale, retenue en matière militaire sont restés les points cardinaux de sa politique étrangère.

Or aujourd’hui, notre monde, notre ordre international bâti sur les principes du droit, du respect des peuples et de leur souveraineté est dangereusement menacé. La guerre d’agression de la Russie en Ukraine et son cortège de victimes et de catastrophes, la montée des nationalismes, des populismes, la mise en danger des frontières de l’Arménie, meurtrie par la catastrophe du Haut-Karabagh et enfin le retour de la guerre et le risque d’embrasement régional au Proche-Orient nous touchent au cœur et exigent, de notre part, une action résolue.

Bärbel, tu viens de le rappeler : tu as été en Israël, comme moi. Nous ne sommes pas beaucoup de présidents de parlement à avoir été en Israël. Et je crois qu’avec Roberta Metsola, nous sommes les seules à y être allées. Ça n’est pas rien et ça signifie, je crois, beaucoup pour nous, pour nos deux pays, pour l’Europe et pour le monde.

L’Union européenne est appelée à compter sur ses propres forces pour garantir sa sécurité et son indépendance, défendre ses valeurs et ses intérêts, et relever les multiples défis que nous avons en partage : changement climatique et transition énergétique, cyber-sécurité et transition numérique, gestion des flux migratoires, intelligence artificielle, élargissement de l’Union, pour ne citer que ceux-là. La tâche est immense ; elle exige un partenariat franco-allemand toujours plus étroit, plus solide et plus déterminé que jamais, comme moteur et comme noyau d’une Europe forte et plus souveraine, alors que la compétition internationale se fait de plus en plus féroce et les transitions, souvent inquiétantes pour nos populations. Nos pays partagent le même esprit européen et la même volonté de dessiner ensemble un avenir commun pour nos deux peuples et pour l’Europe.

L’Assemblée parlementaire franco-allemande incarne cet effort de dialogue et de convergence : elle complète les actions de nos gouvernements, qui se sont réunis récemment, à Hambourg, pour un séminaire franco-allemand inédit, le 10 octobre dernier.

Je suis fière que cette Assemblée, qui fêtera ses cinq ans en mars prochain, concoure à rapprocher nos deux pays et je voudrais remercier en cet instant, tout particulièrement les présidents du Bureau, Nils Schmid et Brigitte Klinkert, pour leur dévouement au service de la cause franco-allemande. 

La réussite de cette Assemblée est à la mesure de votre infatigable engagement pour la faire vivre. Les groupes de travail de l’APFA constituent des liens continus entre nos deux assemblées et permettent l’expression de toutes les sensibilités qui les composent. Avec douze réunions organisées depuis notre dernière séance plénière, chacun se réjouit de constater leur dynamisme et leur visibilité croissante !

Je tiens ainsi à saluer les coordonnateurs des groupes de travail qui accomplissent un travail de fond indispensable :

– Chantal Kopf et Constance Le Grip pour le groupe de travail sur « L’avenir de l’Europe », qui s’est réuni en septembre dernier à l’Assemblée nationale et se penche sur les questions cruciales qui se posent à l’Union européenne : doit-on réformer les institutions avant d’accueillir de nouveaux États membres ? Comment défendre au mieux nos valeur d’État de droit ?

– Andreas Jung et Frédéric Petit pour le groupe de travail sur la « Souveraineté énergétique », qui a conduit pas moins de cinq auditions d’experts et d’acteurs du secteur énergétique, notamment des fournisseurs d’énergie, des gestionnaires de réseaux, les autorités de régulation et la secrétaire d’État allemande Franziska Brantner, pour débattre de nos politiques énergétiques en faveur de la neutralité carbone. D’autres auditions sont actuellement en préparation ;

– Nils Schmid et Vincent Thiébaut pour le groupe de travail sur la « Transposition convergente des directives européennes en droit national français et allemand », qui en à peine cinq mois, depuis sa constitution en juillet dernier, a analysé tout le processus de transposition des directives européennes en France et en Allemagne, ainsi que les litiges résultant d’écarts de transposition.

– et enfin Sandra Weeser et Sabine Thillaye, pour le groupe de travail sur la « Politique étrangère et de sécurité » institué lors de notre dernière séance plénière : il a déjà commencé à dérouler la feuille de route ambitieuse qu’il s’est donnée avec deux auditions, l’une sur la boussole stratégique européenne, l’autre sur la perception et l’analyse par nos deux pays des menaces extérieures ainsi que sur leurs priorités stratégiques. 

Nous avons hâte de connaître vos conclusions sur tous ces sujets essentiels à la relation franco-allemande. 

La diversité des thèmes dont se saisissent cette Assemblée et ses groupes de travail témoignent de la richesse du partenariat franco-allemand

L’ordre du jour de la séance qui s’ouvre aujourd’hui l’illustre une fois de plus, avec des textes sur l’élargissement de l’Union européenne, l’environnement, l’asile et les migrations, ou encore les médias. 

Le débat que vous avez choisi d’organiser sur la diplomatie européenne dans le conflit au Proche-Orient et le rôle qu’y jouent la France et l’Allemagne promet également d’être aussi passionnant que constructif. Nos deux pays sont mus pas la même volonté commune : ne laisser aucune place au terrorisme et créer ensemble les conditions d’une paix durable au Proche-Orient.

Avant d’aborder la situation en Israël, je voudrais, au nom de la représentation nationale, vous présenter tout notre soutien et toutes nos condoléances à la suite de l’attaque terroriste qui a frappé à nouveau la France et qui dans l’horreur, unit nos deux pays, puisque la victime de cet attentat est une de vos ressortissants. Je crois malheureusement que cette actualité nous montre à quel point le combat pour nos valeurs et le combat contre le terrorisme ne peut être mené qu’ensemble, et ne peut qu’être gagné.

Suite à l’attaque terroriste qui a frappé Israël le 7 octobre dernier, par ailleurs, nous avons vu revenir sur le sol européen un nombre inquiétant d’actes antisémites : qu’il s’agisse de paroles, d’inscriptions, de violences, de tels actes sont inacceptables et inexcusables au sein de nos démocraties fondées, nous dit Kant, sur « l’éminente dignité de la personne humaine ». 

Bärbel, je sais que vous êtes particulièrement mobilisés, nous en avons déjà parlé et je te remercie d’avoir salué la marche que nous avons initiée avec le Président du Sénat Gérard Larcher, le 12 novembre dernier à Paris, pour défendre nos valeurs et lutter contre l’antisémitisme. A nouveau, dans ce combat, nous devons être unis, nous devons être intransigeants, parce qu’il en va de nos valeurs les plus profondes.

En la ville natale de Beethoven, qui mit en musique L’Hymne à la joie de Schiller et nous légua ainsi le chef-d’œuvre symphonique qui est devenu l’hymne européen, je m’en voudrais d’oublier l’échéance du 9 juin prochain, autrement dit l’élection de nos députés au Parlement européen. Seule assemblée transnationale élue au suffrage universel direct, c’est le Parlement européen qui vote les textes et le budget européen, tout en exerçant un contrôle démocratique sur la Commission européenne. Dans vingt-sept pays, dont l’Allemagne et la France, les citoyens vont un même jour élire ce « grand sénat souverain » de l’Europe qu’annonçait Victor Hugo et qui est devenu réalité. Après deux guerres mondiales et d’infinies souffrances, les nations d’Europe ont appris à régler leurs relations par le bulletin de vote et la négociation : cette victoire de l’humanisme, de la paix, de la civilisation, nous devons tout faire pour la renforcer.

Ainsi, je terminerai en soutenant l’apprentissage de nos langues respectives, sujet que nous allons aborder dans un instant avec la ministre plénipotentiaire Anke Rehlinger et le ministre Gabriel Attal, que je tiens à remercier aujourd’hui pour leur présence. Vous vous souvenez, lors de notre session plénière à Strasbourg, nous avions tous collectivement appelé de nos vœux la présence physique des ministres de nos gouvernements respectifs à nos travaux : c’est chose faite aujourd’hui. Je vous remercie sincèrement, au nom de tous, d’avoir répondu à notre invitation car c’est aussi grâce à votre présence et grâce à vos interventions que nous faisons vivre notre assemblée franco-allemande.

Ma conviction est que, si nous voulons resserrer les liens qui unissent nos deux peuples, la langue est la clef de tout. Une langue permet de communiquer beaucoup plus que des informations, elle véhicule une culture, c’est-à-dire une façon de voir, de percevoir et de dire le monde, une histoire, des histoires, des valeurs. Pour agir ensemble, il ne faut pas seulement se parler, il faut se comprendre ; et pour se comprendre, il faut se connaître. 

Sur ce sujet comme sur les autres, je ne doute pas que nos échanges de ce jour seront particulièrement fructueux et ouvriront de nouvelles perspectives à notre Assemblée. 

J’aurai pour ma part, dans quelques mois, le très grand plaisir de vous accueillir à nouveau en France pour ces rendez-vous réguliers désormais, et qui je crois sont à la hauteur des enjeux que nous avons aujourd’hui devant nous. 

Je vous remercie.

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