Ouverture de la conférence Emploi et Handicap

Mardi 18 novembre

Hôtel de Lassay

SEUL LE PRONONCÉ FAIT FOI

Mesdames et Messieurs les députés,

Mesdames et Messieurs les responsables institutionnels et associatifs,

Mesdames et Messieurs,

En cette 29ème semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées, c’est un plaisir pour moi d’accueillir cette conférence consacrée à l’emploi et au handicap. Outre la participation de l’Assemblée nationale à la 8ème édition du DuoDay ce jeudi, il m’a semblé indispensable d’organiser ce temps de réflexion et d’échanges autour d’acteurs institutionnels, associatifs et professionnels.

Ainsi que vous le savez, l’année 2025 marque en effet le 20ème anniversaire de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes en situation de handicap. Si le législateur n’a fort heureusement pas attendu les années 2000 pour s’intéresser aux personnes handicapées, ce texte constitue aujourd’hui encore un marqueur fort de l’engagement de la puissance publique en leur faveur.

Et pour cause, les politiques publiques du handicap partent de loin : en 1909, les « classes de perfectionnement » à destination des enfants en situation de handicap visaient à prendre en charge (je cite) « les anormaux d’école afin que ceux-ci ne tombent pas dans la délinquance ».   

Par la suite, si la Première Guerre mondiale et le retour à la vie civile des soldats mutilés poussent la puissance publique à adopter des textes permettant réparation et insertion, les personnes handicapées demeurent alors réduites à leur seule force productive.

Dans les années 1970, la situation commence à évoluer, lentement mais sûrement, vers une véritable politique publique du handicap, avec la remise du rapport Bloch-Lainé, intitulé « Étude du problème général de l’inadaptation des personnes handicapées ».

L’approche utilitariste apparait ici clairement : l’emploi du terme « problème » associé à celui « d’inadaptation » indique que ce sont aux personnes en situation de handicap de s’adapter à la société dans laquelle elles évoluent, et non l’inverse.

Malgré des motivations discutables, ces recommandations ont donné naissance à deux grandes lois en 1975, dont l’une a procédé à la création de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), récemment déconjugalisée et qui existe toujours aujourd’hui. Citons également la création de l’Agefiph (Association nationale pour la gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées) et l’obligation pour les entreprises de recruter au moins 6% de travailleurs handicapés en 1987 ; ou encore la loi de 1990 visant à lutter contre les discriminations à l’endroit des personnes en situation de handicap.

En 2002, le Président Chirac prend un engagement qui marquera un tournant : celui de faire de l’insertion des personnes en situation de handicap un chantier prioritaire de son quinquennat. Deux ans plus tard, en 2004, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) est créée, préfigurant la création en 2020, cette fois-ci sous l’impulsion du Président Macron et de sa majorité, de la 5ème branche de la sécurité sociale.

Mais revenons-en à la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances.

Une loi d’une ampleur inédite, puisqu’elle embrasse l’ensemble de la politique publique du handicap : création d’un guichet unique avec les MDPH (Maison départementale des personnes handicapées), refonte du droit à la compensation, renforcement de l’inclusion en milieu scolaire et dans le supérieur, démultiplication des obligations d’accessibilité avec une prise en compte de l’ensemble de l’environnement des personnes handicapées.

Dans la forme comme sur le fond, l’on assiste donc à un renversement salutaire de la logique qui prévalait jusqu’alors : ce n’est pas aux personnes en situation de handicap de s’adapter à la société dans laquelle elles évoluent, mais c’est bien à cette société de leur proposer un cadre adapté à leur situation individuelle, quelle qu’elle soit.

Alors, 20 ans après, quel bilan pour cette loi singulière et ambitieuse ?

Rappelons que le Parlement ne fait pas que voter la loi, il a également la charge, toute aussi importante, d’en évaluer la bonne exécution. Cette prérogative, tant le Sénat – avec la mission menée par Chantal Deseyne, Marie-Pierre Richer et Corinne Féret – que l’Assemblée nationale en ont récemment fait usage.

Je tiens à cet égard à saluer le remarquable travail réalisé par Christine Le Nabour et Sébastien Peytavie, co-rapporteurs de la mission d’évaluation réalisée par la commission des affaires sociales de l’Assemblée. Remarquable, mais aussi légitimement critique : si des progrès ont été effectués en matière d’accessibilité et d’inclusion, ceux-ci demeurent largement insuffisants au regard des objectifs fixés.

Pour illustrer ce bilan mitigé, je ne citerai que deux chiffres qui concernent directement cette conférence : « 2 » et « 3 ».

« 2 » qui correspond pratiquement au ratio entre le taux de chômage des personnes handicapées par rapport à l’ensemble de la population active (12% pour les premières contre 7,3% pour la seconde).

« 3 » comme le chiffre par lequel il faut multiplier les risques d’être victime d’une discrimination au travail lorsqu’on est en situation de handicap.

Des situations insupportables, mais que la seule indignation ne suffira jamais à effacer, pas plus qu’une inflation législative qui constitue le plus souvent un effet de manche plutôt qu’une solution effective aux problématiques en présence.

C’est à cet égard que je n’ai de cesse, en cette manière comme dans d’autres, de mettre en lumière l’excellent travail d’évaluation et de contrôle produit par notre institution, et d’inviter le Gouvernement à s’en saisir afin de mettre tout simplement en œuvre l’expression de la volonté générale.

Notre conférence d’aujourd’hui n’a pas d’autre but que celui-ci. Et je sais pouvoir compter sur l’engagement de Christine Le Nabour, de Sébastien Peytavie, et de tous les parlementaires qui œuvrent en faveur des politiques publiques du handicap pour faire des recommandations qu’ils formulent une réalité.

C’est tout l’objectif de ce colloque – et je vous souhaite donc d’excellents travaux.

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