Mission d’information sur l’épidémie de Coronavirus-COVID19

Mercredi 15 avril 2020, Richard Ferrand a présidé la mission d’information sur l’épidémie de Coronavirus-COVID19  qui a procédé à l'audition de Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique Covid-19 et Geneviève Chêne, directrice de Santé publique France.

A ce titre, il a posé une question à Jean-François Delfraissy et à Geneviève Chêne.

Richard Ferrand Monsieur, madame, nous mesurons l’importance de votre engagement et de vos responsabilités dans la crise sanitaire sans précédent que nous traversons. Je tiens à vous remercier d’avoir répondu, dans des délais très courts, à notre sollicitation.

Monsieur le professeur, vous avez été nommé le 11 mars dernier président du Conseil scientifique Covid-19, instance pluridisciplinaire chargée de proposer une approche scientifique globale des problèmes auxquels nous sommes confrontés, afin d’éclairer la décision publique dans la lutte contre l’épidémie. Aux termes de la loi du 23 mars 2020, « le comité rend périodiquement des avis sur l'état de la catastrophe sanitaire, les connaissances scientifiques qui s'y rapportent et les mesures propres à y mettre un terme [...] ainsi que sur la durée de leur application ». J’ai moi-même nommé membre de ce conseil, pour l’Assemblée nationale, M. le professeur Jean-Laurent Casanova.

Le Conseil scientifique a rendu sept avis publics, dans lesquels il a d’abord recommandé des mesures de restriction de la vie sociale, puis, devant l’évolution de l’épidémie, un confinement généralisé strict et national, et plus récemment une évolution de la stratégie de dépistage du coronavirus SARS-Cov-2, en établissant en particulier une prise en charge complète des suspicions d’infection dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).

Madame la directrice générale, vous êtes à la tête de Santé publique France, issue de la fusion en 2016, notamment, de l’Institut de veille sanitaire (InVS), de l’Institut national d’éducation et de prévention pour la santé (INPS) et de l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS). Santé Publique France a entre autres pour missions l’observation épidémiologique et la surveillance de l’état de santé des populations, la veille sur les risques sanitaires, la préparation et la réponse aux menaces, alertes et crises sanitaires. Elle assure également la gestion de la réserve sanitaire, ainsi que des stocks de produits, de matériels et de services nécessaires à la protection des populations face aux menaces sanitaires graves.

L’article 1413-4 du code de la santé publique dispose qu’« à la demande du ministre chargé de la santé, l'agence procède à l'acquisition, la fabrication, l'importation, le stockage, le transport, la distribution et l'exportation des produits et services nécessaires à la protection de la population face aux menaces sanitaires graves », et qu’elle « assure, dans les mêmes conditions, leur renouvellement ».

Les moyens de Santé publique France ont été considérablement renforcés depuis le début de la crise, passant de 150 millions à 4 milliards d’euros, afin de lui donner des moyens d’agir à la hauteur des nouveaux défis de l’épidémie en cours, dans un contexte de concurrence internationale qui rend difficile la question sensible des approvisionnements.

Monsieur le professeur Delfraissy, à relire ou à revoir les expressions publiques de quelques-uns de vos éminents confrères, entre janvier et le début du mois de mars, on a le sentiment que les analyses du risque présenté par le Covid-19 sont contradictoires : si certains – les plus rares – prophétisaient ce qui nous arrive, hélas, d’autres évoquaient une « grippette ». Depuis lors, certaines voix évoquent un possible vaccin, selon un calendrier variable, tandis que d’autres annoncent une série de traitements possibles. Chacun comprend que la rigueur du travail scientifique exige du temps, alors même que nous vivons l’urgence et que nous sommes tous, reconnaissons-le, impatients.

Que sait-on de ce virus, outre qu’il est fortement contagieux ? Pourra-t-il un jour être combattu par un vaccin, ou bien fait-il partie de ces maladies dont on ne peut se prémunir, à l’instar du VIH ou de l’hépatite C ? Quelles connaissances avons-nous déjà acquises pour orienter la réponse à l’épidémie ?

Madame la directrice générale, j’ai rappelé certaines missions de Santé publique France. Quelles instructions avez-vous reçues, et quelles initiatives avez-vous prises, et quand, pour doter notre pays de l’ensemble des équipements de nature à nous permettre de lutter contre cette épidémie ? Je pense particulièrement aux masques, aux médicaments et aux tests – à propos desquels il est parfois fait état de pénuries ou de craintes de pénuries. Vous nous direz d’ailleurs si c’est à tort ou à raison.

Quelles mesures de protection et de prévention entendez-vous prendre pour que nous réussissions le déconfinement progressif annoncé par le Président de la République lundi soir ?

Jean-François Delfraissy Je commencerai par me présenter rapidement : je dirigeais encore il y a peu le Comité consultatif national d'éthique (CCNE), mais j’ai surtout été engagé depuis plus de trente ans dans l’étude d’une longue série d’épidémies, dont celle du VIH, qui reste la plus marquante et qui a fait près de 40 millions de morts, ou encore celles d’Ebola ou de l’hépatite C. J’ai en particulier été délégué interministériel à la lutte contre le virus Ebola. J’ai eu aussi l’occasion de créer, lorsque j’étais à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), le groupe REACTing (REsearch and ACTion targeting emerging infectious diseases), pour favoriser la réaction aux grandes épidémies.

Je regardais ce qui se passait depuis le mois de janvier en me disant que je n’avais plus l’âge de m’occuper de telles grandes crises sanitaires. Et me voici devant vous…

Oui, il y a une incertitude. Je l’avoue : j’étais moi-même modérément inquiet au mois de janvier – contrairement à Geneviève Chêne, qui s’inquiétait dès ce moment. Mes craintes ont grandi quand j’ai eu accès à certaines données et à certains modèles, au début du mois de février, puis lorsque les prédictions de ces modèles ont commencé à se réaliser, en particulier en Italie. J’ai alors commencé à lancer l’alerte ; une réunion de scientifiques a eu lieu à l’Élysée et la réaction s’est enclenchée.

La notion du temps n’est pas la même pour un médecin, pour un malade, pour un politique. Vous évoquiez les grandes pandémies que nous avons connues : il nous a fallu quinze ans pour mettre au point les trithérapies utilisées contre le VIH, huit à dix ans pour éradiquer l’hépatite C, dix-huit mois pour trouver un vaccin contre Ebola. On nous demande maintenant de trouver un vaccin ou un médicament en moins de quatre mois contre un virus dont nous ne savions à peu près rien il y a six mois !

Nous connaissons bien la famille des coronavirus : ce sont des virus très ubiquitaires, responsables notamment du coryza. La majorité d’entre nous en avons été infectés, et cela s’est très bien passé dans la plupart des cas. Nous avions connu des signaux d’alerte, mais qui ont sans doute été sous-estimés car ces épidémies n’ont pas atteint l’Europe : celui du SARS (syndrome respiratoire aigu sévère), puis celui du MERS (Middle East respiratory syndrome, syndrome respiratoire du Moyen-Orient), qui a sévi en Arabie saoudite et dans les pays voisins. Ces coronavirus avaient une létalité forte. Mais, pour des raisons que nous connaissons encore mal, après une ou deux poussées, ces épidémies se sont arrêtées, sans d’ailleurs qu’il y ait eu une immunité populationnelle très forte.

Arrive alors ce nouveau coronavirus. Il est particulièrement toxique, en raison notamment de son caractère très contagieux. Il nous faut faire montre d’une grande humilité, car on découvre ce virus progressivement.

Le conseil scientifique Covid-19 est un objet nouveau. Était-il nécessaire ? À mes yeux, il n’a d’intérêt que s’il apporte quelque chose aux structures existantes, sans entrer en contradiction avec elles ; c’est la raison pour laquelle j’ai souhaité que Santé publique France et le Haut Conseil de la santé publique y soient représentés. Cette structure souple, formalisée par la loi du 23 mars 2020, pourra peut-être plus facilement que d’autres institutions faire entendre un message. En aucun cas notre rôle n’est décisionnel : c’est bien le politique qui décide, et nous ne sommes là que pour l’éclairer sur ces décisions très lourdes et très complexes.

Sa durée de vie sera, je pense, limitée. Il s’agit d’apporter une réponse à une crise précise. Mais notre grande démocratie dispose d’outils, de structures, d’agences qui continuent d’agir et qui, une fois le choc passé, devront reprendre la main.

Notre sixième avis portera sur la stratégie de déconfinement ; le septième, et sans doute le dernier, proposera une perspective à moyen terme : y aura-t-il une deuxième vague ? Y aura-t-il un médicament ?

Ce comité est multidisciplinaire : au-delà du médical, j’ai tenu à ce que les sciences humaines et sociales, qui sont des sciences, soient présentes. J’ai tenu également à ce que la société civile y soit représentée, et c’est le cas, grâce à la vice-présidente d’ATD-Quart monde. Il comprend évidemment un épidémiologiste et un modélisateur, qui travaillent étroitement avec Santé publique France.

Le confinement avait deux objectifs.

Il s’agissait d’abord de permettre que ceux atteints de formes graves du Covid-19, et qui ont besoin de lits de réanimation puissent en disposer : notre système de soins ne devait pas être submergé. Je crois que nous pouvons, très prudemment, considérer que ce premier objectif est en passe d’être atteint. Les nouvelles admissions en réanimation diminuent, doucement, mais elles partent de très haut ; les lits de réanimation se sont aussi multipliés. Notre modèle de soin semble avoir tenu le choc. Je souligne cependant qu’il existe une grande hétérogénéité entre les régions, pour des raisons que nous ne comprenons pas encore totalement.

Le second objectif était de ralentir la circulation du virus, afin que le nombre de nouvelles infections théoriques à la fin du confinement permette de mener une politique volontariste en matière de tests, de suivi et d’isolement des patients.

Je voudrais maintenant appeler votre attention sur quelques points.

Tout d’abord, le grand public et même les politiques pensent, à tort, que le déconfinement sera une étape différente. En passant du confinement au déconfinement, on ne va pas passer du noir au blanc mais du noir au gris foncé. Cette date du 11 mai a été donnée comme repère pour le citoyen, mais elle s’inscrit dans un continuum : il n’y aura pas un avant et un après. Si nous ne faisons pas très attention à cela, le virus et le cycle de multiplication virale peuvent repartir.

Pour parler techniquement, le R0, c’est-à-dire le nombre de personnes auxquelles un malade risque de transmettre la maladie, devrait se situer aux alentours de 0,6 ou 0,7, selon les données dont nous disposons, ce qui signifie que 10 000 à 15 000 personnes continueront à être infectées chaque jour en France. Si nous sommes dans cet ordre de grandeur, nous serons vraisemblablement capables de tracer les personnes concernées. Nous allons passer ce cap de manière très progressive et avec grande prudence, sachant qu’il risque de se produire quelques petites bouffées épidémiques auxquelles nous devrons faire très attention.

Ensuite, le grand public et les politiques ont l’impression que l’innovation technologique va nous sauver, que nous allons avoir les tests qui ont fait défaut au début –presque 100 000 tests de type RT-PCR (réaction de polymérisation en chaîne – transcription inverse) par jour pour effectuer le diagnostic – et un moyen de traçage numérique. Ces deux outils sont intéressants mais nous devons garder en tête le nombre de personnes à risque médical, susceptibles de développer une forme grave de la maladie si elles sont infectées. Le Covid-19 est une maladie bénigne dans l’immense majorité des cas, même si les gens qui l’ont eue disent avoir été un peu « cognés », mais elle peut entraîner un passage vers des formes sévères voire graves, celles qui posent problème puisqu’elles entraînent la mortalité. Contrairement à d’autres pays, la France a fait le choix d’essayer d’éviter au maximum la survenue de cette mortalité due aux formes graves.

Qui risque de développer une forme grave de la maladie ? Les personnes de plus de soixante-cinq ou soixante-dix ans, celles qui souffrent de polypathologies, d’une insuffisance cardiaque ou respiratoire, d’un cancer, celles qui ont une affection de longue durée, et aussi des sujets jeunes, diabétiques ou obèses. En l’absence d’un traitement préventif, ces 17 à 18 millions de personnes devront rester confinées de manière relativement stricte.

Enfin, je voudrais vous alerter sur l’utilisation des tests sérologiques dont on ne connaît pas encore la signification. Alors que nous n’en avions aucun début mars, nous en avons maintenant 3 à 4 000. Avec l’arrivée de tests sérologiques commerciaux automatisés de type Élisa, il sera possible d’installer de grands plateaux et de faire 100 000, 200 000 ou 300 000 sérologies par jour, c’est-à-dire de passer à une échelle quasiment semi-industrielle. Rappelons cependant que ces tests détectent le fait d’avoir été en contact avec le virus mais pas le virus lui-même, comme un sérodiagnostic de rubéole ou d’hépatite.

Quel pourcentage de personnes ayant été en contact avec le virus va-t-on trouver dans la population générale ? Les premières données montrent une immunité populationnelle beaucoup plus faible que celle que l’on aurait pu imaginer. Or séparer les séropositifs des séronégatifs au Covid-19 ne présente qu’un intérêt limité quand seulement quelque 10 % de la population a été touchée. En outre, on ne sait pas ce que signifie réellement une séropositivité au Covid-19. Il y a une quinzaine de jours, je pensais encore que l’on était protégé quand on avait été en contact avec le virus. C’est plus compliqué que cela : il y a des anticorps facilitants et donc peut-être un réservoir du Covid-19. Faisons attention ! À une époque, on a cru que les personnes séropositives au VIH étaient protégées, ce qui a été à l’origine d’une lourde histoire. Sans allez plus loin sur le sujet, je tiens à vous alerter : ne nous précipitons pas en croyant que l’innovation technologique va nous tirer d’affaire ; avançons pas à pas et avec une grande prudence.

Richard Ferrand De votre réponse à cette question qui me paraissait fondamentale, je retiens qu’avoir été malade ne prémunit de rien puisque l’on ne connaît pas la nature des anticorps développés. Dans ces conditions, un vaccin pourra-t-il un jour venir à bout de cette maladie ? Comme vous l’avez rappelé, les séropositifs du SIDA n’ont jamais pu bénéficier d’un vaccin. En l’état actuel de la science, il y a donc lieu de douter de l’utilité de la sérologie et de la possibilité d’un vaccin, même si l’on peut toujours espérer. Vous ai-je bien compris ?

Jean-François Delfraissy En ce qui concerne la sérologie, j’ai voulu donner un signal d’alerte en voyant les Allemands évoquer, dans la perspective d’une sortie de confinement, la création d’un passeport pour les personnes séropositives ou séronégatives au Covid-19. Pour ma part, je pense qu’il faut attendre un peu avant de se lancer dans la création d’un tel passeport en France pour les raisons que je viens de vous indiquer. Vous avez donc parfaitement compris.

S’agissant du vaccin, je serais peut-être plus optimiste. Avant le Covid-19, d’immenses plateformes de fabrication de vaccins, employant des technologies internationales, ont été mises au point. On peut imaginer un vaccin offrant une protection incomplète – ce qui le rendra un peu difficile à gérer – au début de 2021. À cet égard, la France a un rôle à jouer puisque l’un des vaccins possibles pourrait être celui contre la rougeole et le Covid-19 sur lequel travaille l’Institut Pasteur. Ne croyez pas ceux qui vous disent qu’ils auront un vaccin dans les trois mois, mais on ne peut pas exclure l’arrivée d’un vaccin incomplet à l’horizon d’un an.

Richard Ferrand La clarté de votre propos rappelle que la complexité de la science invite à l’humilité et à la patience.

Geneviève Chêne Je suis heureuse d’être devant vous ce soir, dans des conditions permettant le respect de la distanciation sociale qui est actuellement de mise. Je ne peux que partager l’analyse de Jean-François Delfraissy sur la complexité de la période difficile que nous traversons et sur les lacunes de notre savoir concernant cette maladie. Cette situation implique de la transparence, de la confiance dans l’expertise et dans la science. Il est donc important de venir vous éclairer.

Prévue par la loi de modernisation du système de santé, l’agence Santé publique France est née en mai 2016 de la fusion de trois établissements et du groupement d’intérêt public ADALIS (Addictions drogues alcool info service) qui fait de la prévention par de l’écoute à distance. J’ai pris mes fonctions le 4 novembre 2019, après avoir été auditionnée par les commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat. Le travail de fusion et de création de Santé publique France avait été réalisé par mon prédécesseur, le docteur François Bourdillon.

L’agence assure trois types de missions. La première, auparavant dévolue à l’InVS consiste à faire de l’observation, de la veille et de l’alerte. C’est son cœur de métier qui allie beaucoup d’expertises et d’interventions auprès des populations, en particulier lors des épidémies. Sa deuxième mission, auparavant confiée à l’INPS, est celle de la prévention et de la promotion de la santé. Sa troisième mission, qui relevait de l’EPRUS, la conduit à répondre aux situations de crise. En décidant cette fusion, le législateur a regroupé des expertises pour créer une structure équivalente aux agences de santé publique des pays comparables.

Santé publique France est un centre de référence en santé publique, une agence d’expertise scientifique fondée sur l’idée d’un continuum allant de la connaissance à l’intervention. Elle agit dans une logique de compréhension des problèmes de santé à l’échelon des populations et elle est en cela complémentaire de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) qui est axée sur les produits de santé et les professionnels de santé. Agissant au plus près des terrains, Santé publique France dispose d’un réseau de cellules régionales qui interviennent en appui des Agences régionales de santé (ARS).

Deux pans de l’activité de l’Agence répondent à une logique un peu différente de l’expertise scientifique pour la gestion de crise. Il s’agit d’une fonction d’exception qui se prépare en continu : la constitution et la formation de la réserve sanitaire ; la gestion des stocks stratégiques de l’État.

La réserve sanitaire, qui intervient sur le territoire à la suite d’une alerte, a réalisé des opérations de grande ampleur et tout à fait réussies au cours de la période 2016-2019 : vaccination contre la coqueluche à Mayotte ou contre la rougeole dans certaines régions françaises ; déploiements dans les zones touchées par l’ouragan Irma ; mobilisation aux côtés de la sécurité civile et de la Croix-Rouge lors du rapatriement de nos compatriotes de Wuhan, en janvier dernier.

La gestion des stocks stratégiques de l’État est aussi une activité particulière car, comme en ce qui concerne la réserve sanitaire, l’établissement agit uniquement sur instruction ministérielle et à la demande de l’État. Nous avons une capacité d’auto-saisine dans l’ensemble des champs de nos missions sauf pour ce qui relève du 5° de l’article L. 1413-1 du code de la santé publique : « La préparation et la réponse aux menaces, alertes et crises sanitaires ». Dans ce cadre, nous agissons sur ordre.

J’aimerais insister sur trois aspects de cette situation épidémiologique majeure et totalement inédite.

Pour nous, agence sanitaire, cette histoire commence le 31 décembre 2019 : le réseau international des agences sanitaires, alerté par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), reçoit la notification de l’existence d’un cluster de vingt-sept cas de pneumonie inexpliquée à Wuhan. Le 9 janvier, nous apprenons que le virus est découvert et identifié, ce qui montre que nous avons fait de grands progrès par rapport au SIDA. Ayant un passé scientifique dans le domaine du VIH-SIDA, je me souviens que les premiers cas ont été décrits en 1981 et que le virus a été découvert en 1983 grâce à une équipe française de l’Institut Pasteur dont faisait partie la virologue Françoise Barré-Sinoussi, nommée récemment à la présidence du Comité analyse recherche et expertise (CARE).

Pour nous, l’alerte a commencé le 10 janvier dernier, avec l’instauration d’une surveillance individuelle des potentiels cas importés de Wuhan, qui pourraient constituer la première phase d’une épidémie. Nous avons alors publié la première définition des cas. Les trois premiers cas importés ont été signalés le 24 janvier. Le premier cluster de cas a été détecté ensuite à la station de ski de Contamines-Montjoie, en Haute-Savoie, et il a nécessité une très forte intervention avec une mobilisation de la direction générale de la santé (DGS). Nous avons mené une investigation importante autour de ces cas pour identifier les contacts et limiter la diffusion, ce qui s’est révélé très efficace.

Au cours de cette période, nous avons réfléchi aux différents scénarios possibles. À partir de la première alerte du 10 janvier, pendant les premières phases d’endiguement et de freinage, chaque jour a apporté son lot de nouvelles connaissances. Ce n’est qu’à la mi-février que nous avons disposé de suffisamment d’éléments pour comprendre vraiment la gravité des cas.

Deuxième aspect, qui rejoint totalement le constat de Jean-François Delfraissy : la situation en France semble s’être stabilisée mais elle reste grave. Hier, le nombre total de décès en lien avec le Covid-19 était de plus de 15 000 : environ 10 000 dans les établissements hospitaliers ; plus de 5 000 dans les EHPAD et les établissements médico-sociaux. On observe un excès de mortalité, toutes causes confondues, sur le territoire français partagé par une sorte de ligne Est-Ouest, ce qui traduit l’effet de cette épidémie de Covid-19 mais qui doit aussi conduire à s’intéresser aux patients qui ont besoin d’être pris en charge pour d’autres pathologies. La situation est d’une gravité particulière pour les personnes ayant dépassé un certain âge et celles qui présentent des comorbidités.

La situation s’est stabilisée sur un haut plateau : plus de 100 000 cas confirmés depuis le début de l’épidémie ; plus de 70 000 personnes hospitalisées. Dans cette phase de diffusion dite communautaire du virus, le point clef est de faire baisser la pression sur le système de soins et de santé. Il faut limiter les contaminations car celles-ci vont se traduire par des hospitalisations dans une proportion qui peut paraître assez faible – environ 5 % – mais qui représente un nombre élevé de patients pour le système de santé.

Compte tenu de nos missions, notre intervention s’exerce d’abord dans le domaine de la surveillance épidémiologique. Il s’agit de collecter toutes les informations nécessaires pour caractériser cette épidémie dans tous les secteurs – nombre de cas confirmés, de cas hospitalisés, etc. –, de mettre en place l’identification des cas et des contacts pour prendre les mesures appropriées, ainsi que de fournir au directeur général de la santé les éléments nécessaires à son point quotidien. Cela mobilise un grand nombre de réseaux et d’acteurs, que je remercie chaleureusement pour ce travail qui nous permet de suivre les tendances.

Nous agissons également en matière de prévention et de promotion de la santé, notamment dans la préparation des messages.

Richard Ferrand Nous étions, mes collègues et moi, déjà informés sur Santé publique France. Nous attendons des réponses à la question simple que j’ai posée : quelles mesures de protection et de prévention entendez-vous prendre pour assurer la réussite du déconfinement progressif annoncé par le Président de la République ?

Geneviève Chêne En ce qui concerne la gestion des stocks pour le compte de l’État et sur instruction ministérielle, je vous indique que sept commandes et dix-huit marchés ont été passés sur le fondement de l’urgence impérieuse depuis la première saisine ministérielle du 30 janvier 2020. Ce travail important est conduit en continu avec le ministère. Nous en sommes aujourd’hui à dix-sept lettres de saisine et plus de 2,2 milliards de masques commandés.

S’agissant du déconfinement, l’enjeu est de limiter la reprise de l’épidémie. Nous avons quelques semaines pour préparer cette phase opérationnelle. Les grandes questions vont bien sûr être coordonnées par le directeur de crise, à savoir le directeur général de la santé, qui en a identifié un certain nombre. Quelle doctrine pour les tests ? Quel seuil nous permettrait de considérer que le 11 mai, nous avons atteint un stade où l’épidémie est suffisamment maîtrisée pour que l’impact du déconfinement progressif sur une reprise potentielle de celle-ci soit le plus faible possible ? Comment mettre en place, grâce aux outils numériques mais pas seulement, un véritable service de santé publique, en mesure de prendre sur le terrain les mesures nécessaires pour identifier les contacts ? Comment collecter l’ensemble des données qui permettront quotidiennement, à l’échelle géographique la plus fine possible et à partir des laboratoires qui effectuent les tests, de fournir rapidement aux décideurs les résultats leur permettant d’adapter les mesures de gestion du déconfinement ?

Richard Ferrand Je retiendrai que vous avez posé les bonnes questions, même si je n’ai pas toutes les réponses à ce stade.

 

Toutes les actualités

Mardi 13 mai 2025

Evénement

Cérémonie commémorative du 80e anniversaire de la Victoire du 8 mai 1945

Lundi 12 mai 2025

Evénement

Vingt-quatrièmes Permanences citoyennes permettant à cinq citoyens d’échanger avec la Présidente, à l’Assemblée nationale

Jeudi 8 mai 2025

Evénement

Commémoration du 80e anniversaire de la Victoire du 8 mai 1945, à l’Arc de Triomphe

Mercredi 7 mai 2025

Evénement

Cérémonie de remise d’un manuscrit de Robespierre à la Bibliothèque de l’Assemblée nationale

Lundi 14 avril 2025

Evénement

Vingt-troisièmes Permanences citoyennes permettant à cinq citoyens d’échanger avec la Présidente, à l’Assemblée nationale

Jeudi 10 avril 2025

Evénement

Colloque en hommage à M. Louis Mermaz, ancien Président de l’Assemblée nationale

Mercredi 9 avril 2025

Evénement

Cérémonie d’inauguration de la Bibliothèque restaurée de l’Assemblée nationale

Mardi 8 avril 2025

Evénement

Cérémonie de remise du label « Villages et Villes Citoyennes »

Mardi 8 avril 2025

Evénement

Signature d’une convention entre l’Assemblée nationale et Sorbonne Université

Mardi 1 avril 2025

Evénement

Inauguration de l’installation de l’artiste Elsa Tomkowiak « Echo »

Lundi 31 mars 2025

Evénement

Deuxième édition du Prix du court métrage politique